Coventry
Carol ? Une erreur de lien ?
Hé non, ces deux chansons s'enchainent si bien, "God rest ye
merry, gentlemen" suivant "Coventry Carol" dans la même vision, que
j'ai choisi (avec l'accord de ma licorne, c'est sa clairière aprés
tout!) de ne faire qu'une seule page pour les deux.
Je suis ainsi sûr que vous commencez par le début... A
moins que vous n'alliez volontairement plus bas, sans lire ce qui concerne
"Coventry Carol", mais là, ça vous regarde, et je n'y peux
rien...
Une ferme, quelque part, là où il neige
en hiver... Probablement pas dans la région de Coventry, plutôt
plus haut, bien plus haut au nord. Encore plus haut au nord, au-dela du
mur d'Adrien, ou de ses vestiges, en Ecosse. Pourquoi là-bas? Je
n'en sais rien... Je sais juste que c'est là.
Le soir de Noël, il neige dehors, il fait bon dedans, grâce
à la cheminée où une bûche de chêne se
consume. Les braises et les flammes légères éclairent
la salle à vivre de cette ferme aux murs de pierres sèches,
tout en jetant des reflets d'or et de bronze sur les épais carreaux
de verre qui ornent les fenêtres.
Un chaudron pend à la crémaillère, tandis que
des marmites sont posées de part et d'autre de l'âtre.
Dans un angle de la pièce, une femme, probablement la maitresse
de céans, berce un bébé en chantant doucement. Elle
pense à son bébé, elle pense à Noël. Elle
pense à son autre enfant, un fils, qui est loin d'eux ce soir, retenu
par un maitre cruel qui ne lui a pas donné congé pour passer
cette nuit avec sa famille. Elle rêve alors que le bébé
s'endort. Elle rêve que son fils a eu son congé, et qu'il
va arriver, son chien sur les talons. Elle l'entend frapper à la
porte, elle pose doucement le bébé dans son berceau, tire
sur lui l'épaisse couverture de laine, se lève, va à
la porte...
...Là où elle attendait son fils, elle accueille son époux,
revenu de la ville où il avait affaires. Il est accompagné
de deux visiteurs, l'un d'eux est un forestier des environs, l'autre à
en juger par ses vêtements et son allure, un homme du sud, du levant,
un Turcoman. Ils entrent. Elle leur souhaite la bienvenue en sa demeure,
elle leur offre la bénédiction de Noël.
Ailleurs... Un jeune homme, presqu'encore imberbe, avance dans la nuit,
il lutte contre le vent, contre la neige, contre le froid. Il tente de
se protéger en resserrant son tartan, il frissonne quand le vent
passe entre ses jambes, il porte un kilt, il n'est pas assez riche pour
avoir des braies. Un grand colley noir et feu l'accompagne, sa robe est
constellée de flocons de neige qu'il secoue de temps à autres.
Ils sont décidés, en ce soir de Noël, à rejoindre
leur foyer. Les brebis sont à l'abri dans la bergerie, elles se
tiendront chaud, elles ont du fourrage pour deux jours, et le maitre ne
reviendra pas avant la nouvelle année. Les autres ont eu leurs congés,
il restait seul, ombre triste dans la lumière de Noël, qu'à
cela ne tienne...
Il est fatigué de marcher, fatigué de lutter, fatigué
de chercher les repères. Il s'arrête, s'accroupit, protégé
du vent et de la neige par un muret, protégé de la morsure
du froid par le colley qu'il serre contre lui. Dès qu'il aura repris
quelques forces, il repartira.
Une lueur au loin, il est arrivé, il frappe à la porte
et sa mère vient lui ouvrir. Le colley va sentir le Turcoman, et,
satisfait, va se coucher prés de la cheminée, le museau sur
ses pattes croisées. Les trois hommes sont attablés, de lourdes
chopes devant eux. Il y a une place libre sur un banc, un godet de grog
bien chaud, ainsi qu'un chope vide aussitôt remplie d'une ale crémeuse
tirée d'un tonnelet. Le bébé dort toujours, le colley
dors déja.
Les plats sont vides à présent, tous félicitent
le fils qui a choisi d'honorer Noël et sa famille, tous félicitent
le fils qui a trompé le maitre, le cruel maitre qui va fêter
Noël en ville, mais qui refuse le congé d'un bon chrétien
en ce jour sacré!
Il est l'heure. Tous se lèvent, la Dame chante Noël, son
fils bat la cadence sur un tambour qui n'est qu'un tonnelet sans fond fermé
par une peau tendue, le forestier joue d'un violon qu'il a fabriqué
lui-même, et le Turcoman joue d'une flute au son aigrelet. Le père
surveille le bébé, craignant que la musique ne finisse par
le réveiller.
Puis tous vont dormir à présent. Le colley rêve
qu'il monte la garde devant le berceau. Le Turcoman est l'invité
étranger, il prendra le grand lit. Le petit lit revient au forestier,
qui le cède au fils, le fils proteste mais finit par céder,
il est si fatigué d'avoir tant marché, tant lutté...
Le forestier va dormir dans le fenil, au-dessus de l'étable, ainsi
que le couple de fermiers.
Le fils s'endort, il est au chaud sous l'épaisse couverture.
Il ne regrette pas d'avoir affronté le froid, il aurait même
affronté les légions de l'enfer, avec pour seul allié
son colley, dans le but de célébrer cette nuit sacrée,
cette nuit que l'on doit passer auprés des siens, pour fêter
une autre famille, fondée il y a bien longtemps. Je sais qu'il rêve,
mais c'est son rêve, et, n'y étant pas invité, je ne
vais pas le conter.
Un homme, chaudement vêtu, monté sur un grand cheval,
parcours la campagne au pas. Il regarde à droite, il regarde à
gauche, il cherche avec ses yeux ce qu'il devrait trouver avec son coeur,
mais on coeur est aveugle. Le manteau de neige étouffe tous les
bruits, hors celui des branches qui s'allègent de leurs blancs fardeaux
dans un bruissement feutré. Le cheval s'arrête prés
d'une congère. Le cavalier pâlit. Car il sait ce qui l'attend
à présent.
A winter garden
Loreena McKennitt, l'enchanteresse
retour à l'opéra