THE TOWN I LOVED SO WELL
(© Phil Coulter)

In my memory I will always see
The town that I have loved so well
Where our school played ball by the gasyard wall
And we laughed through the smoke and smell.
Going home in the rain running up the dark lane
Past the jail and down beside the fountain
Those were happy days in so many, many ways
In the town I loved so well.

In the early morn the shirt factory horn
Called women from Creggan, the Moor and the Bog
While the men on the dole played a mothers role
Fed the children and then walked the dog
And when times got rough, there was just about enough
But they saw it through without complaining
For deep inside was a burning pride
For the town I loved so well.

There was music there in the Derry air
Like a language that we could all understand
I remember the day when I earned my first pay
As I played in a small pickup band
There I spent my youth and to tell you the truth
I was sad to leave it all behind me
For I'd learned about life and I'd found a wife
In the town I loved so well.

But when I returned how my eyes were burned
To see how a town could be brought to it's knees
By the armoured cars and the bombed out bars
And the gas that hangs on to every breeze
Now the army's installed by that old gasyard wall
And the damned barbed wire gets higher and higher
With their tanks and guns, Oh my God, what have they done
To the town I loved so well.

Now the music's gone but they carry on
For their spirit's been bruised, never broken
Oh, they'll not forget still their hearts are set
On tomorrow and peace once again
Now what's done is done and what's won is won
And what's lost is lost and gone forever
I can only pray for a bright brand new day
In the town I loved so well.

 

 

Si vous connaissez la version française chantée par Tri Yann, oubliez tout!
Cette chanson est loin d'être une bluette sirupeuse vantant les charmes campagnards d'un petit village breton...

Cette chanson décrit la tristesse et la nostalgie d'un habitant de Derry à l'égard de sa ville, saccagée lors de l'opération Motorman et de ses suites.

L'opération Motorman

Les origines :
Au début de l'année 1972, l'IRA, affaiblie par l'internement et la montée des mouvements non-violents en faveur des droits civiques (elle a perdu entre 500 et 1000 volontaires sur les 2500 qu'elle comptait en 1971), ainsi que par quelques "bavures" (comme l'assassinat de William West, membre du Royal Irish Ranger et habitant de Derry), propose une trêve au gouvernement anglais. Trêve qui sera acceptée, mais pas suivie d'effet en ce qui concerne les négociations portant sur le découpage des districts catholiques et protestant ainsi que sur la répartition des logements sociaux.

Toujours durant la même période, fin mars 1972, le gouvernement Faulkner de Stormont est suspendu, et l'Irlande repasse sous tutelle britannique, c'est la fin du "home rule" tant décrié de part et d'autre, et le début du "direct rule" qui durera jusqu'en 1999, et qui ne sera pas forcément meilleur.
Ce gouvernement était à forte majorité unioniste (c'est à dire partisan d'un maintien de l'Irlande du Nord dans le Royaume Uni), et était responsable d'une répression bien pire que celle qu'avait commis les troupes anglaises, au point que, en 1969, les catholiques ont vu débarquer les soldats anglais avec soulagement - ils venaient les protéger contre les violences protestantes, ce que l'IRA, désarmée, avait été incapable de faire! Ce soulagement n'a été que de courte durée, mais il a été bien réel.
Pour mémoire, c'est ce gouvernement "Home Rule" nord-irlandais qui est à l'origine de l'internement, auquel s'opposait Tuzo, commandant des forces anglaises en Irlande du Nord.

Les causes de la suspension du "Home Rule" sont à chercher dans la flambée de violence du début 1972, que Stormont a été incapable (mais le voulaient-ils vraiment?) d'endiguer, et qui a justifié la création par l'IRA de "communes libres" à Derry, Belfast, et dans d'autres villes ayant des quartiers catholiques soumis aux pogroms protestants.
Le gouvernement anglais a alors proposé au gouvernement "Home Rule" de reprendre pour son compte le maintien de la paix, de l'ordre et de la loi, ce que Faulkner a refusé (car alors, les bavures n'auraient plus pu être couvertes, et les paramilitaires protestants auraient pu être inquiètés!).
Stormont étant toujours aussi incapable de faire cesser les troubles, le Parlement de Westminster a donc légiféré pour mettre fin au "Home Rule".

Pour prouver à tous sa capacité à agir militairement (et devenir ainsi plus crédible lors de négociations ultérieures avec le gouvernement anglais), l'IRA lance le vendredi 21 juillet, à Belfast, une campagne d'attentats sans précédent : 22 bombes exploseront en 75 minutes dans le centre de Belfast, faisant 9 morts et environ 130 blessés. Bien qu'ayant été prévenues de chaque explosion avec assez d'avance pour faire évacuer les lieux, les autorités ont préféré attendre et ramasser les victimes, de manière à discréditer l'IRA et à légitimiser ce qui va suivre... l'opération Motorman.

L'objectif :
Anéantir les zones d'interdiction administrées par l'IRA (comme la commune libre de Derry - "Free Derry") et y rétablir la loi et l'ordre au nom de la Couronne.

Le déroulement :
Durant la dernière semaine de juillet 1972, le contingent anglais en Irlande se renforce de 4 000 combattant, atteignant ainsi le total respectable de 21 000 combattants, qui seront engagés le 31 juillet dans l'opération Motorman.
Pour mémoire, l'IRA comptait à l'époque 1 500 à 2 000 volontaires, plus environ 3 000 réservistes.
Cette force a commencé à encercler les bastions républicains avant de donner l'assaut, appuyée par des blindés légers ainsi que par des chars lourds équipés de lames de bulldozer pour déblayer les barricades.
Ordre avait été donné d'employer toute la force disponible pour faire cesser toute résistance, allant jusqu'à préconiser l'emploi de lance-roquettes antichar.
L'IRA a eu la sagesse de ne pas risquer la vie de civils dans cette bataille perdue d'avance et s'est éclipsée sans combattre, ce qui donne le bilan miraculeux de deux morts (un adolescent catholique et un membre de l'IRA) pour l'ensemble de l'opération!

Cette opération est la plus grande opération militaire que l'armée anglaise ait menée depuis Suez, dépassant même son engagement en Corée, au Viet-Nam, et, plus près de nous, en Irak.

Dans les semaines qui ont suivi, des postes militaires avancés ont été établis dans les anciennes zones d'interdiction, les écoles ont été réquisitionnées pour servir de casernes de fortune, les rues et les carrefours ont été barrés par des chevaux de frise, les patrouilles en blindé sont devenues systématiques et les héritiers de Cromwell ont bien montré qu'ils étaient de retour, multipliant les rafles, les destructions de biens, et les brutalités diverses, entre autres exactions.
L'Irlande du Nord était de nouveau un pays en guerre...

Les conséquences :
Entre le début de l'opération Motorman et juin 1973, près de 1200 personnes seront internées, total qui sera porté à 1500 fin novembre 1973. A l'automne 1973, l'internement frappera même des enfants!
Quant à l'armée, elle pratiquera des exécutions sommaires quand elle arrêtera des militants républicains notoires, comme Eddie O'Rawe et Jimmy Rowntree, deux "Provos" arrêtés désarmés à Belfast, et immédiatement assassinés par les parachutistes qui venaient de procéder à l'arrestation.

Tout cela donnera un second souffle à l'IRA, qui reprendra de plus belle ses campagnes militaires en 1973, en bénéficiant d'un armement tout neuf en provenance de Lybie et des USA.

Un char "Centurion" des Royal Engineers (corps du Génie de l'armée anglaise), équipé d'une lame de bulldozer, en train de raser une barricade à l'entrée du Bogside (quartier de Derry faisant partie du "Free Derry") lors de l'opération Motorman.
Photo provenant de www.troopsoutmovement.com/


Les paroles en anglais proviennent de ce site : http://www.vincentpeters.nl/triskelle/
Merci à Stef "Korighan" pour avoir attiré mon attention sur cette chanson.
Traduction en français (si elle y est) : Licorne.

Retour aux chants pour une Irlande libre
Retour au Shebeen
Retour à l'Opéra
Retour à la clairière de la licorne